Un vieux texte qui date de 2010 je crois !

Nous nous sommes arrêtés. Les lourdes armures posées à terre, l’or continue à briller. Ce soir, le cliquetis des armes sonne faux, il est étrangement menaçant. Le ciel écarlate qui chevauche le monde ne promet guère de lendemains merveilleux. Nous sondons la terre. Elle est sèche et muette. Sous nos pas écrasants, elle s’est inclinée. Les tambours ne battent plus, tout comme nos cœurs paralysés. La peur. La peur de découvrir, au-delà des collines, l’ennemi. La Reine vaporeuse se balance sur son trône. Son visage sélénien n’atténue même pas notre angoisse. Ses yeux indigo sont poudrés de rêves. Elle imagine son royaume sauvage glisser sur le monde ténébreux et, parcourant les allées du temps, briller de mille feux. Mais l’heure est à la bataille, aux sacrifices, aux hurlements, aux tiraillements, à l’agonie, aux morts. Propulsée dans la réalité, la Reine se décide à élaborer une tactique. Elle écoute les capitaines, statique. Sa chevelure boréale danse doucement sur ses épaules laiteuses. Son regard, las, suit pourtant avec ferveur les gestes précipités des chefs d’armée.

Bientôt, nous abordons les rivages de l’effroi. La Reine nous pousse dans les bras de la mort, ses rêves en suspension dans son regard brumeux. Elle nous donne en pâture aux créatures enragées, de l’autre côté des collines d’émeraude. Peut-être est-ce la dernière couleur que nous verrons… Quelle est donc la couleur de la mort ? Un arc-en-ciel terni ? Un camaïeu de souffrances ? Un bleu profond, celui des iris de notre Reine, impératrice de notre nuit. Avec une conviction immuable, la Reine pointe l’horizon de son index : « Allez ! » souffle-t-elle. Son murmure caresse l’armée et la glace.